Interface maudite

Une voix surgit dans le casque :

- 20 juin 2052, test premier. Alpha vous avez l’autorisation de débuter l’opération.

- Hé, poulette, je ne suis pas une lettre grecque, mon nom c’est Axel !

- Très bien... Axel, le ton perdit de sa froideur quelques instant, tu peux y aller.

- Rotor à 2/3, propulsion à accélération constante engagée. Libération des taquets, et c’est partit !

Robin prit la parole :

- Axel, souvient toi que c’est un proto, il y en a pour quelques millions entre tes neurones, alors tu y vas tout doux. Tu fais une rotation au-dessus de la piste, puis tu reviens par 30° ouest. Tu ne changes rien au plan de vol. Tu ne forces pas le drône. C’est le premier test alors pour l’instant pas de manœuvres imprudentes !

- Salut ma grande. Je te rappelle que je suis pilote d’essai depuis deux ans, je connais mon job. Ton joujou reviendra à la case départ sans aucune égratignure.

L’objet ovoïde s’éleva dans les airs. D’une seule couleur, d’un seul noir de jais, l’œuf de métal amorcé déjà son virage. Dans le silence de la base, seule l’hélice du drône se faisait entendre. Le son était enregistré sur les consoles de surveillance. Tout à coup des dizaines de micro, d’oreilles électroniques, furent saturées. Le bruit du rotor n’était plus audible. Un parasite perturbait l’expérience, un son si fort qu’il couvrait entièrement le frottement des pales sur l’air.

Un des opérateurs ôtant son casque pour éviter de devenir sourd, s’écria : " Que fout ce grillon dans la salle de test ! ".

Quelque heure plus tard, Robin retrouva Axel à la cafétéria.

- Alors que penses-tu de mon proto.

- 10 millions de nuyen, c’est un peu cher. Surtout qu’il n’y a pas de place pour les enfants !

Un sourire parcouru les lèvres délicates de Robin. Elle se reprit :

- Non, sérieusement qu’en penses-tu ?

- Ca fait deux ans que je bosse ici. C’est la première fois que je contrôle un drône avec une telle précision. Cet engin est maniable, rapide, précis. Il va faire un malheur auprès des mercs.

- Tu crois ?

- Ecoute ma poule, le test de ce matin ne t’a pas suffit. Ton équipe a atteint un niveau de silence incomparable. Tes ingénieurs avaient tellement amplifié le son pour entendre ton bébé voler, qu’un simple criquet leur a crevé les tympans. Que veux-tu de plus ?

- Ce que l’on a incorporé dans ce drône tiens de la plus haute technologie mais il y a en plus ce module dont je t’ai parlé.

- La cellule neuro-biologique ?

- Chut, imbécile ! Tu n’es pas sensé être au courant et moi à peine. Ce truc me fait peur c’est pour ça que je t’en ai parlé. Au tout début on ne savait même pas si tu résisterais à la liaison avec le drône. Ce truc est dangereux !

- Et alors ! Maintenant c’est moi qui le contrôle. Et c’est vraiment le pied, foi d’interfacé, c’est vraiment le meilleur engin que je n’ai jamais piloté.

Le visage de Robin s’obscurcit, alors Axel changea de ton :

- Ne t’inquiètes pas, je ne suis plus dans la matrice à me battre contre des CI noires, cet œuf ne peut rien me faire, au pire il s’écrasera sur le micro d’un de tes ingénieurs. Tu n’auras plus qu’à lui payer un nouveau tympan. C’est si grave ?

Le ton d’Axel se voulait rassurant et il pensait faire sourire son amie. Mais c’est bien plus pensive, qu’elle quitta la table. Son inquiétude était lisible sur son visage, pourtant Axel était de bonne humeur. Avec cet engin, il retrouvait les mêmes sensations que dans la matrice. La vitesse, la liberté, le tout associé à une pointe de danger.

Une eurowind filait dans les rues de downtown, elle s’arrêta devant un grand immeuble. L’homme qui en descendit était de forte stature, un bon mètre quatre vingt pour 78 kilos. Ses cheveux coiffés en brosse étaient si court que le cuir chevelu était visible. Axel en sortant de son petit bolide s’étira, bailla longuement, puis se dirigea vers la porte principale de l’immeuble. Ce grand bâtiment de verre n’était rien d’autre qu’une série d’appartement. Néanmoins Axel savait de source sûre que tous les habitants du treizième étage travaillaient pour le gouvernement des UCAS. Il s’engagea dans l’ascenseur et appuya sur le chiffre 13. Quelques secondes plus tard les portes de métal s’ouvrirent sur un long couloir tapissé de couleur pastel. Il s’engagea sur un tapis mauve et se dirigea vers l’appartement numéro 1308. Il eut à peine le temps d’appuyer sur la sonnette que déjà une superbe jeune femme brune avec un regard rappelant la lueur des étoiles lui ouvrit la porte. Elle lui sauta au cou et l’embrassa longuement. Au bout d’un instant Axel la souleva sans aucun effort apparent et la fit rentrer dans l’appartement. La porte claqua sur l’impulsion qu’Axel lui donna avec son pied. Leurs lèvres toujours jointes, ils tombèrent sur le canapé.

Une heure plus tard leur corps se détachèrent et Judith pris la parole.

" Alors, comment s’est passé ta journée ? "

"  Excellente, surtout sur la fin. "

Alors ils partirent sur un éclat de rire. C’était un couple heureux.

Le lendemain quittant sa femme, Axel partit vers le centre de recherche. Il arriva comme à son habitude une bonne dizaine de minutes avant l’heure du briefing. Son travail depuis deux ans était celui d’un pilote d’essai. Il avait été à une époque un runner, un coureur de l’ombre. Mais après avoir failli mourir dans la matrice, il s’était rangé. Il avait trouvé ce boulot avec le gouvernement. Depuis deux ans il vivait bien tranquillement. La journée, il pilotait des drônes ou toutes sortes d’engin que les forces armées voulaient tester, et le soir il retrouvait chez lui Judith. Il s’était marié avec elle un an auparavant et depuis, il nageait dans le bonheur.

Il entra en second dans la salle de briefing, juste derrière le directeur du centre d’essai. Pour Axel, ce mec venant rarement aux divers briefing, la réunion d’aujourd’hui devait revêtir une grande importance aux yeux des grands pontes. Une fois tout le monde entré et assis, la voix d’un technicien, amplifiée par un implant, décrivit la séance du jour.

" Au sommaire d’aujourd’hui, manœuvre de tir et d’évitement de la part du drône. Nous en sommes aux premiers essais, les tirs seront donc effectués avec des missiles basses vitesses sans charge. "

La peur de perdre un prototype de 10 millions de nuyen, se lisant sur le visage du directeur, Robin, prit la parole.

" Monsieur le directeur, les missiles n’atteindront jamais le drône, et quand bien même cela arrivait, ils n’exploseraient qu’en surface avec de la poudre de plâtre. Les conséquences pour le drône serait alors minime. "

Le directeur pris une moue sceptique, alors Robin reprit : " De plus la carrosserie du drône est suffisamment solide pour résister à une chute de 30 mètres sans vitesse initiale. Nous effectuerons aujourd’hui des essais uniquement dans la limite de cette altitude. ". Un peu rassuré, le patron du centre, un homme gros et gras pour une taille assez petite, fit signe au technicien de continuer son exposé.

Au bout d’une heure, la présentation du travail de la journée étant finie, toutes les personnes ayant assistées à la conférence se dirigèrent vers leur poste attribué. Axel quant à lui se dirigea tranquillement vers la passerelle supérieure. C’est là qu’avait été placée, il y a quelques semaines, la nouvelle interface. D’après Robin, cette interface utilisé des codes similaires à ceux des CI noires. L’influx qu’elle apportait au cerveau était d’un type plus facilement interprétable par ce dernier. Le contrôle du drône était donc plus complet et plus "naturel". Axel se moquait de savoir comment les techniciens avaient réussi ce tour de force, le fait est que ça marchait, et même plutôt bien. Jamais Axel n’avait connu un drône aussi performant, et aussi précis. Il s’installa dans son fauteuil, sorti le câble de la gaine protectrice et connecta la fiche au niveau de sa tempe. Alors autour de lui tout explosa. Il n’était plus sur une chaise mais dans un hangar. Il n’était plus sanglé sur son fauteuil mais retenu par des taquets au sol. Il n’avait plus une vision binoculaire mais ses capteurs pouvait repérer tout ce qui bougeait sur 360°. Sa vision passa du spectre visible à l’infrarouge. Il sentit son rotor se mettre en marche. Les signaux affluaient depuis l’ordinateur central. Les techniciens surveillaient des centaines de paramètres en même temps, mais lui Axel était à l’intérieur du drône, sentir le vent sur la carrosserie, pouvoir supporter des accélérations vertigineuses, être dans l’antichambre de la perfection, voilà le bonheur de l’interfacé.

La première partie de la séance s’était déroulée à merveille. Aucun missile n’avait pu atteindre le drône, Axel se sentait invulnérable quand il pilotait ce drône. La seconde parie s’annonçait plus coriace, les missiles seraient plus rapides et plus intelligents. Mais Axel savait que l’intelligence des projectiles était toute relative. Au lieu de foncer tout droit, ils bougeraient un peu, se dirigeant vers une cible ovoïde qu’il n’atteindrait jamais !

Axel repéra un premier missile sur sa gauche, une simple manœuvre d’évitement suffit. Puis un second arriva depuis le haut, il dut alors déclenché le propulseur gauche pour s’éloigner suffisamment. Un troisième vint de la droite, l’excitation d’Axel devenait perceptible dans la salle de contrôle. Il déclencha son capteur infra rouge, non pas le mien se dit-il mais celui du drône. Il réussit à voir les traînées des missiles et à anticiper leur changement de direction, il les évita. Non ce n’est pas lui qui les avait évités mais le drône qu’il pilotait. Deux autres missiles apparurent au seuil de ses capteurs, puis six autres.

Dans la salle les ingénieurs observaient des dizaines de paramètres sur leur écran. L’œil électronique fixé sur le visage d’Axel repéra des gouttes de sueur. Les appareils chargés de surveiller l’activité du cœur et du cerveau d’Axel se mirent tout à coup en alerte. Le corps d’Axel se raidit, s’arqua, puis retomba sur la chaise en même temps que le drône sur le béton de la piste d’essai.

Le chef du centre était désespéré, six missiles venaient d’atteindre simultanément le drône. 10 millions de nuyens gisaient sur le sol. Que s’était-il passé ?

Récit d’Axel

Ce matin là je me suis réveillé avec une étrange douleur à la tête. Je ne savais pas où j’étais, j’avais même du mal à me rappeler qui j’étais. Un rapide regard circulaire me permit d’entrevoir une infirmière qui quittait ma chambre. Une infirmière ? J’étais donc à l’hôpital.

Les souvenirs affluèrent alors, mes oreilles bourdonnèrent du bruit des missiles, mes yeux revirent l’explosion, mon cœur tapa de plus en plus fort dans ma poitrine, mon cerveau explosa …

Le docteur sur les avertissements de l’infirmière couru jusqu’à la chambre 1034. Le corps du patient était pris de convulsion. Il attrapa une seringue, la remplit d’un produit brunâtre et planta l’aiguille dans le bras du patient. Le corps de l’homme, retomba sur le lit, et dans la pièce le calme revint.

Récit d’Axel

C’est le bruit des oiseaux qui m’a réveillé ce matin là. Je me sentais étrangement distant. Mon champ de vision était réduit, impossible de voir à 360°. Mes capteurs infrarouge semblaient morts, mes systèmes de sécurité ne répondaient pas. Malgré les divers tests, aucun de mes propulseurs ne semblaient vouloir fonctionner. Je me suis donc mis hors fonction.

Loin, très loin, j’entendis des voies : " Docteur, le cœur vient de s’arrêter ! ". Des séries de bip m’empêchèrent de comprendre la plupart des mots. Tout à coup ma batterie interne du avoir un problème. Un énorme éclair parcouru tous mes circuits. Je fus obligé de remettre en marche mes fonctions minimums pour ne pas que tout mes circuits internes grillent à cause d’une batterie défectueuse.

Ce jour là c’est Judith que je vis en premier à mon réveil. Son regard était plein de tristesse et de compassion. Elle semblait inquiète, pourtant après un check up de ma carrosserie, je ne semblais avoir subit aucune avarie majeure. Certes quelques-uns uns de mes circuits n’envoyaient plus de réponse et mes senseurs semblaient être réduit au minimum, mais j’étais encore fonctionnel. Un homme en blanc m’injecta de l’huile. Il voulait sûrement lubrifier mon bras. Mon bras ?

Je repris enfin conscience du temps. Les ingénieurs avaient donc commencer à réparer certains de mes éléments, au moins l’horloge interne. Au bout de quelques jour, je revis Judith, elle s’approcha de mon plan d’atterrissage et me dit :

" Aujourd’hui, on est dimanche. Ils m’ont permis de te parler. Le docteur pense que cela te permettra de reprendre conscience du monde qui t’entoure plus rapidement… Ils m’ont autoriser à t’expliquer ce qui t’arrive et où tu es. Après l’accident, la clinique du centre t’a soigné. Il espérait te soigner sans faire appel à un service extérieur et sans ébruiter l’affaire. Ils avaient besoin de toi vivant pour analyser leur échec … "

En d’autre mot, il m’aurait bien laisser tomber en panne si je ne n’avais plus aucune utilité directe …

" … C’est pourquoi, ils t’ont fait transférer ici, dans cet hôpital. L’accident a eu lieu il y a déjà un mois. Le docteur m’a dit que tu n'avais repris pleinement conscience que depuis trois jour. Cela aurait pu être plus rapide mais ils ont bien failli te tuer en voulant accélérer la rythme. Au début ils pensaient, qu’en t’enlevant ton interface, ils t’aideraient à reprendre conscience de ton corps et de ton esprit… Mais tu manqué mourir. D’après le docteur, lors de l’accident certains nerfs sont mort et c’est l’interface qui les as remplacés de manière quasi automatique. Il m’a dit que c’était la première fois qu’il voyait une telle symbiose avec du cyberware. S’il t’avait enlever l’interface comme il voulait le faire, il t’aurait détruit tous tes centres nerveux. Ils te l’ont donc laisser, mais ta guérison sera plus longue et plus contraignante. "

Dans le bouillonnement de questions qui surgissaient de mon cerveau, j’ai réussi à trouver deux mots :

" Judith ? Chérie ? ". Puis, je suis retombé dans l’inconscience.

De loin, très loin, des pleurs me provinrent. J’entendis des voix qui se mêlèrent aux pleurs, et puis dans un maelström de bruit, vint la douleur. Une douleur fulgurante, ma batterie disfonctionnait à nouveau. A si ces ingénieurs m’avaient donné un cœur comme aux hommes … mais, je suis un homme me dis je alors. Cette douleur, alors …

Les voix se firent plus proche : " C’est bon, il stabilise. On l’a récupéré … "

Quand je me suis réveillé, Judith étais là. Ma femme, ma petite femme n’était pas partie, elle était restée tout le temps de mon évanouissement. La première chose qui me frappa fut ses vêtements. Elle n’avait pas pu se changer aussi vite, ce n’était pas possible. J’étais resté inconscient au maximum cinq minutes, comment pouvait-elle être rentré à la maison, avoir récupéré des habits et …

" Combien de jour se sont écoulés depuis la dernière fois ? "

Judith l’air épuisé me répondit d’une voix fragile

" Il y a déjà une semaine que je t’ai parlé. Depuis tu t’es réveillé de nombreuses fois mais tu n’as jamais semblé me reconnaître. Tu te sens bien ? "

" Eh bien, à part mes jambes qui sont engourdies, je me sens en forme. Un peu sonné mais en forme. Et toi puce, je ne t’ai pas trop fait peur ? Tu sais quand je suis tombé sur le béton de la salle … Non, quand le drône est tombé, je me suis vraiment senti très mal… "

" Chut ! " m’interrompit-elle. Tu ne dois pas en parler, pas pour l’instant, ton psychisme n’est pas encore près à faire la différence entre le drône et toi. Ne penses plus à ça !

Nous avons passé l’après midi ensemble. Un docteur nous surveillait de loin, et Judith semblait souffrir de ne pas pouvoir me révéler mon véritable état. Mais ce fut tout de même une après midi fabuleuse car ma bien aimée était là.

Durant un mois, les docteurs me surveillèrent et me donnèrent régulièrement des médicaments et des piqûres. Ma femme venait me voir chaque week end. Les premières semaines nous restions dans la chambre, je n’avais pas le droit de sortir. Judith me parlait de ce que je ratais à l’extérieur. Elle me parlait de tout et de rien, mais sa présence était mon réconfort. Ses paroles m’éloignaient de plus en plus de mes perceptions encore parfois entachées de celle du drône. En fait c’est elle qui m’a guéri plus que toutes les drogues que les médecins ont pu me faire prendre.

Le dernier week end, j’eus le droit de sortir en fauteuil roulant. Judith me promena dans tout le parc et ce fut une journée formidable. Seule une chose me troubla. Quand on me ramena à ma chambre, je dus me faire porter dans mon lit, mes jambes n’avaient aucune force. Une fois Judith partit, j’ai demandé au docteur ce qui se passait. Il a voulu éluder la question en me disant que chacun de mes organes avaient mis beaucoup de temps à guérir et que mes jambes mettrait-elles aussi du temps…

" Allons docteur, ça fait plus de deux mois que j’ai eu mon accident ! Vous devez savoir combien de temps mes jambes vont mettre de temps à guérir. A moins que … "

" Le problème c’est que vos jambes ne sont pas malades ! C’est votre cerveau qui est malade. Certaine partie de votre cerveau, à cause de l’interface que nous n’avons pas pu enlever, croit encore que vous êtes un drône. On a essayé plein de choses, mais on n’a pas réussi à lui rappeler que vous étiez un homme à part entière. Tant que ce blocage existera vous serez paraplégique ! "

Je regardai le docteur avec effroi.

" Je vais devoir rester sur un fauteuil roulant toute ma vie ? Ne peut-on pas me greffer un de ces membres artificiels ? "

" Je vous l’ai dit, ce ne sont pas vos jambes qui sont malades, mais votre cerveau. Il ne commandera pas plus à des jambes artificielles, qu’à vos vrais jambes. Vos vrais jambes, sont parfaitement fonctionnelles. Nous les avons stimulés durant ces derniers mois avec des impulsions électriques et même vos muscles sont dans un état identiques à celui d’avant votre accident. "

" Mais ne peut-on guérir mon cerveau ? "

" Que croyez-vous que nous tentions depuis un mois ? Vous avez fait plus de progrès que je ne croyais possible. Quand vous êtes arrivé ici, votre état était désespéré. Par deux fois votre cœur s’est arrêté, pour le relancer nous avons aggravé votre cas. Les impulsions électriques vous ont enfoncé dans votre côté drône. Que vous soyez à ce niveau de motricité est déjà un exploit ! "

" Je serais donc dans un fauteuil, toute ma vie … "

" Non, pas forcément. Le blocage peut sauter à tous moments. Mais… Sans vouloir être pessimiste, s’il n’a pas sauter après tout ce que nous avons tenté, il ne sautera plus jamais. En fait vous avez le choix. Soit vous êtes un battant et chaque jour vous musclerez artificiellement vos jambes, pour qu’elles restent vives pour le jour où vous remarcherez, soit vous êtes pessimiste, réaliste, et vous donnerez vos jambes en tant qu’organe pour des personnes à qui elles seront utiles. Ne faites pas le choix maintenant. Vous quitterez cet Hôpital d’ici une ou deux semaines, à ce moment là vous me donnerez votre réponse. "

Après cette nouvelle, j’étais abasourdi. Je ne marcherai plus jamais, je resterai handicapé à vie. Pas à cause de mon corps, mais de mon cerveau, à cause d’une interface… Non, à cause de cette puce intégrée au drône. Robin avait bien essayer de me prévenir, mais j’en avais fait qu’à ma tête. C’était cette saloperie qui m’avait pris mes jambes. Mais je me battrai, ma réponse était déjà prête, et si le docteur avait été encore dans la pièce je lui aurais hurler au visage. Je lui aurais crier ma colère et ma détermination : " Ce sont mes jambes et je les garderais ! "

Dans les semaines qui suivirent, je reçus beaucoup de visites. Maintenant que je n’étais plus un fou pensant et réagissant comme un drône, mes anciens collègues venaient me voir. Ce fut d’abord les grands patrons, avec leurs phrases toute faite. Qu’ils aillent au diable avec leur pitié ! Ce fut ensuite le tour des ingénieurs. Ils vinrent en groupe. C’est tout juste s’ils n’avaient pas leur appareil photos. Je me suis souvent demandé s’ils étaient venus pour moi ou pour ce que je représentais ? C’est à dire un cobaye ayant servi à une expérience dangereuse et ayant survécu ? Leurs regards purement scientifiques, dénués de sentiments humains ne m’ont jamais laissé de doutes quant à la réponse. Puis ce fut le tour de Robin. Elle vint accompagner de deux gros balaises que je ne connaissais pas. Au premier abord je me suis demandé s’il devait la protéger contre moi ou contre "ellee même ". Puis j’ai vite réaliser qu’un infirme, sans jambe ne pourrait rien contre elle. Cette femme était donc tenue au secret, ces relations d’amitié avec moi étaient trop connues pour qu’on lui permette de me parler librement.

" Il faut que tu sois fort Axel. Ils vont essayer de tout te mettre sur le dos. Ils veulent un bouc émissaire, et ils l’auront ! Tu es une cible trop parfaite pour eux. "

Elle se rapprocha de moi et alors qu’elle me donnait un baiser d’adieu, elle glissa dans ma main un papier. Elle se fit rappeler à l’ordre par l’un des gardes :

" Pas de contact physique madame ".

Elle me fit un clin d’œil puis disparu à jamais de ma vie !

Une fois les visites de la journée terminées, j’ai lu ce bout de papier. Utilisé un tel moyen de communication relevait de l’archaïsme. Une simple puce, aurait contenu plusieurs milliard de bout de papier. Le seul avantage fut que je n’eus pas à me connecter à un ordinateur pour décoder le message de Robin. Premièrement, je ne sais pas si j’en aurais été capable, et puis cela aurait sûrement était découvert par l’hôpital. Qui dit hôpital, dit gouvernement et dit trahison assurée. Le message de Robin était clair : Elle me proposait de disparaître des fiches officielles, de m’enfuir devant ce qui me guettait. Il y avait même un lieu de contact pour rencontrer un decker.

Je sortis de l’hôpital un lundi matin. Judith vint me chercher avec l‘eurowind puis nous filâmes à la maison. Nous sommes montés dans l’ascenseur et descendus directement au garage. On a pris la voiture de ma femme, une simple ford américar. A l’intérieur, il y avait toutes nos valises, tout ce dont nous avions besoin pour fuir. On a roulé toute la nuit, on a parcouru toutes les ruelles connus afin de semer d’éventuels poursuivants. Après avoir passé une nuit dans un motel sordide, nous nous sommes rendus au point de rendez-vous avec le decker.

" Madame, mes hommages, salut demi-portion ! " Mon sang bouillait, mais la main de Judith se fit apaisante sur mon épaule.

" Alors vous êtes venus, pour effacer votre SIN de la circulation. OK, notre amie commune a déjà réglé le forfait, vous n’avez qu’à vous asseoir et à admirer le spectacle. "

Moins d’une demi-heure près notre rencontre avec le decker, je n’ai jamais su son nom, nous étions devenus Axel et Judith Brubaker. Nous habitions Seattle et étions locataire d’un immeuble dans cette ville. Robin ayant même prévu les billets d’avion, nous sommes allés à l’aéroport. Une fois dans l’avion, des doutes me vinrent quant à l’honnêteté de Robin. Ne m’avait-elle pas envoyé à Seattle pour que toutes les accusations retombe sur moi. Ne m’avait-elle pas fait fuir, non pas par amitié, mais par intérêt. Quoi qu’il en soit, j’étais en train de survoler les NAO et une autre vie nous attendait Judith et moi. Même handicapé, je pouvais encore me promener dans la matrice et peut-être que j’arriverais à piloter à nouveaux des drônes. Peut être devrais je reprendre le boulot que j’avais avant de rencontrer ma femme : Shadowrunner. Seul l’avenir le savait, mais pour moi ça ne faisait aucun doute !


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